Aggravation du risque non déclarée : double peine pour l'assuré

Les articles L.113-8 et L.113-9 du Code des Assurances prévoient les sanctions applicables à l'assuré en cas d'omission ou de déclaration inexacte du risque.

Aggravation risque assuré

Si le premier prévoit tout simplement la nullité du contrat d'assurance en cas de mauvaise foi prouvée de l'assuré dans ses déclarations, le second fait état de l'absence de la bonne foi et fait une distinction sur le moment de la découverte de l'omission.

Des sanctions différentes selon le moment de la découverte de l'omission

  • Si l'omission est constatée avant tout sinistre, l'assureur peut soit maintenir le contrat contre une augmentation de la prime, soit résilier le contrat.

  • Si l'omission est constatée après le sinistre, l'indemnité sera réduite « en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés ». C'est la réduction proportionnelle des primes. L'indemnité est réduite selon un calcul fait entre la prime payée et celle qui aurait du être payée en cas de bonne déclaration.


Mais qu'en est-il lorsque l'assureur découvre après un premier sinistre une omission et qu'un second sinistre survient avant la rupture du contrat ou la conclusion d'un nouvel accord ? Quelle règle appliquer pour l'indemnité due au titre de chacun des sinistres ?

Le cas d'espèce est particulier. Une société de fabrication d'articles de porcelaine souscrit un contrat d'assurance multirisque industrielle en 2009 auprès de deux assureurs. Fin 2011, un premier incendie détruit en partie les locaux, le matériel et les stocks. Pendant les travaux de remise en état, un second incendie se déclare en février 2012 dans un autre bâtiment. La société assigne alors les assureurs en paiement des indemnités dues.

A cet effet, l'assuré estime qu'en présence de deux sinistres différents et ayant provoqué des dommages distincts, l'application de l'article L.113-9 doit s'apprécier pour chaque sinistre séparément. Ainsi, la cour d'appel aurait dû rechercher, en distinguant les deux sinistres en cause, si l'assureur n'avait pas eu connaissance du risque non déclaré avant leur survenance.

La réduction proportionnelle des primes applicable aux deux sinistres

L'argument n'est pas retenu par la Cour de cassation dans sa décision de la deuxième chambre civile du 02/03/2017 (n°15-27831) qui précise que : « si l'article L. 113-9 institue, au profit de l'assureur qui découvre avant sinistre l'aggravation non déclarée du risque, une option entre la résiliation et la proposition à l'assuré d'une prime majorée, il n'organise pas la sanction de la réticence lorsque le [second] sinistre survient avant la rupture du contrat ou l'intervention d'un nouvel accord, alors que l'assureur demeure engagé par le contrat primitif malgré l'aggravation ; cette éventualité doit être assimilée au cas de constatation après sinistre ».


La cour d'appel a pu déduire que la règle proportionnelle de primes avait vocation à s'appliquer à chacun des sinistres en cause dès lors que :

  • les risques n'ont pas été complètement déclarés par l'assuré par suite de son manquement aux prescriptions du contrat qui lui imposaient de faire vérifier chaque année les installations électriques et de communiquer les rapports annuels à l'assureur.

  • ce n'est qu'à l'examen d'un rapport d'intervention de décembre 2011, que l'assureur a pu se rendre compte que les installations électriques des locaux comportaient des défectuosités générant des risques d'incendie;

  • la résiliation du contrat n'est intervenue que postérieurement aux deux sinistres.

Par conséquent, elle applique la réduction proportionnelle des primes à chacun des deux sinistres, à laquelle s'ajoutent les franchises. Au final, c'est prêt de 2 433 544 euros qui resteront à la charge de l'assuré. La Cour de Cassation se montre ici sévère. Bien que l'omission ait été constatée entre le premier et le second sinistre, elle décide de retenir la sanction de constatation après sinistre dans les deux cas retenant que le contrat était toujours en cours d'exécution.