L'indemnisation complémentaire ne fonctionne pas pour le chauffeur salarié victime responsable d'un accident de la circulation
Ce 24 mars 2016 la Cour de cassation a rendu une décision venant préciser sa jurisprudence relative à l'indemnisation complémentaire des accidents du travail constituant un accident de la circulation. Si l'arrêt et l'exposé des motifs peuvent sembler compliqués de prime abord, la décision de la Haute juridiction n'est finalement qu'une application stricte de sa jurisprudence dans ce domaine.
En l'espèce un chauffeur routier est victime d'un accident du travail. Lors d'un trajet son camion et sa remorque sont renversés à la suite d'une manœuvre d'évitement de deux véhicules lors du franchissement d'un rond-point. La victime se tourne donc vers l'assureur du véhicule qu'il conduisait dans un cadre professionnel (donc pour le compte de son employeur), le FGAO, et la caisse primaire d'assurance maladie afin d'obtenir une expertise médicale et le versement d'une provision par l'assureur.
Si en appel l'employé obtient gain de cause, la Cour de cassation est venue casser cette décision dans un second temps.
Pour ce faire la Cour de cassation est venue rappeler le principe posé par la loi en cas d'accident du travail constituant un accident de la circulation. Elle a rappelé, dans un premier temps, que par principe la victime d'un accident du travail est privée du bénéfice du régime spécial d'indemnisation prévue par la loi Badinter de 1985. C'est la réparation forfaitaire des accidents du travail qui doit s'appliquer. Néanmoins cette dernière étant moins avantageuse que celle de la loi Badinter, le législateur a donc prévu une exception. Ainsi les articles R. 211-8 du code des assurances et L. 455-1-1 du code de la Sécurité sociale mettent en place un système d'indemnisation complémentaire. Pour activer cette indemnisation complémentaire il faut cependant répondre de certaines conditions. Il faut que l'accident survienne sur une voie ouverte à la circulation publique et qu'il implique un véhicule « conduit par l'employé, un préposé, ou une personne appartenant à la même entreprise que la victime ».
Dans un second temps elle a rappelé que l'obligation d'assurance ne s'applique pas pour la réparation des dommages subis par une personne salariée ou travaillant pour un employeur dans le cadre d'un accident du travail, exception faite de la réparation complémentaire qu'elle a citée dans un premier temps.
Dès lors la Cour de cassation peut casser l'arrêt. En effet elle énonce que cette indemnisation complémentaire n'est possible que lorsque le véhicule est conduit par l'employeur ou un autre salarié de la même entreprise. Elle est donc exclue lorsque c'est le salarié responsable de l'accident qui conduisait le véhicule.
Cette décision n'est pas étonnante au regard de la jurisprudence constante de la Cour de cassation qui avait déjà énoncé ce principe à l'occasion d'autres arrêts présentant le même cas de figure, notamment le 5 février 2015 .
Attention donc, en cas d'accident du travail constituant un accident de la circulation c'est bien le régime forfaitaire des accidents du travail qui s'appliquera. Pour bénéficier de l'indemnisation complémentaire il faudra répondre à plusieurs conditions : un accident sur la voie publique, avec un autre véhicule de la société conduit par un membre de cette dernière autre que la victime responsable de cet accident. Ce complément d'indemnisation ne bénéficiera donc jamais au conducteur lui-même.