Le coavionnage, le blablacar des airs ?
Il n'y a plus de doute que la réussite économique des plateformes collaboratives s'exporte par divers moyens de transports : le coavionnage semble être un nouveau marché prometteur. Cette ouverture au grand public de vols privés à frais partagés semble avoir le vent en poupe. Néanmoins, ce nouveau moyen de transport partagé se heurte à la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) qui veut encadrer cette pratique.
Le coavionnage : nouveau venu dans le ciel français
Un groupe de travail a été mis en place à la fin de l'année 2015 pour étudier ce nouveau phénomène de transport qui fait face à de nombreuses questions en suspens.
Le coavionnage vise à partager les frais de transport, entre le pilote d'un petit avion privé et des particuliers lors d'un déplacement prédéfini. On notera que cette pratique est tout à fait possible pour un pilote voulant effectuer un trajet privé ou de loisir, tout en partageant les frais éventuels avec des proches ou amis.
Toutefois, les conclusions du groupe de travail de la DGAC du 16 janvier 2016 ont estimé que le coavionnage est assimilé à un transport de passagers. Ce type de transport doit se soumettre en principe à des règles extrêmement contraignantes (détention d'une licence de pilote professionnel, certificat de transport aérien, obligation d'assurance). Le plus important, c'est d'assurer la sécurité des personnes transportées.
Quel cadre juridique pour ce type de transport ?
Le régime de responsabilité diffère selon que le transport est assuré par un pilote privé dans le cadre d'un vol privé ou de loisir ou par un pilote professionnel dans le cadre d'un transport aérien.
Dans une décision rendue le 22 août 2016, la DGAC a quelque peu assoupli sa position. Cet assouplissement se fait au vu de l'orientation de l'Agence européenne de sécurité aérienne (EASA) qui dans le cadre d'un règlement européen n°965/2012 du 5 octobre 2012, a confirmé que le coavionnage entrait dans le champ de l'aviation légère.
Le cadre législatif européen de l'aviation légère implique que le nombre de personnes supportant le coût du trajet ne peut excéder 6 personnes et doit être réparti entre tous les occupants de l'appareil (y compris le pilote). La DGAC a distingué deux types de vols : les vols de moins de 30 minutes entre le décollage et l'atterrissage et ne pouvant s'éloigner à plus de 40 km de son point de départ et tous les autres vols.
Pour les vols de moins de 30 minutes, le pilote doit détenir une licence PPL, une expérience de plus de 200 heures de vol (dont 25 heures effectuées au cours de ces 12 derniers mois). Tandis que pour tous les autres vols, il suffit simplement de détenir la qualification de vol instrument ou bien la qualification d'instructeur. Les plateformes proposant des services de coavionnage devront clairement identifier les règles applicables en matière de transport public ne pouvant être applicables au vol partagé.
Toutefois, cet assouplissement de position de la DGAC n'a clairement pas réglé la question des vols partagés entre états frontaliers ni celle de la sécurité des passagers charge aux plateformes spécialisées de prévoir une assurance aviation légère adaptée.
Malheureusement, le coavionnage ne peut bénéficier du même système de protection que celui mis en place par la loi Badinter qui intervient dans le cadre de l'indemnisation des préjudices matériels et corporels subis après un accident de la route. Ce qui implique, l'adoption d'un nouveau cadre juridique spécifique à ce type de déplacement aérien.
A l'heure actuelle, en cas d'accident aérien lors d'un vol privé, la responsabilité du pilote peut être engagé en rapportant la preuve d'une faute de sa part (dans une limite de responsabilité relative à chaque passager fixée à 114 366 euros (article L.6421-4 du Code des transports). Toutefois, à la lecture de cet article, il est difficile de démontrer une « vraie faute » du pilote notamment si l'on est en présence d'autres facteurs externes (météorologique, problèmes techniques).