Le sort des frais d’expertise devant la juridiction pénale
La Cour de cassation a rendu le 9 juin 2016 une décision sévère, mais pour autant basée sur une stricte application des textes, portant sur un litige entre la victime d'une infraction et le Fond de garantie des actes de terrorisme et des autres infractions (le FGTI).
Après avoir été victime d'une agression la victime se retourne vers la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) afin d'obtenir la réparation de son préjudice. Le tribunal correctionnel saisi de l'affaire ordonne deux expertises. Ces dernières, ayant pour but de chiffrer le préjudice subi par la victime, comportent des frais d'expertise à hauteur de 3 600 €. Le tribunal met à la charge de la victime ces provisions à valoir sur la rémunération des experts.
Le litige survient lorsque la victime demande que le FGTI prenne à sa charge ces frais d'expertises. La victime fait en effet grief à la décision du tribunal correctionnel « de rejeter sa demande tendant au remboursement de la consignation des frais d'expertise », elle estime en effet « que cette dépense est en lien direct avec l'atteinte à la personne » et demande donc, logiquement selon elle, que ces dépenses doivent être prises en charge au titre de son indemnisation.
La Cour de cassation n'approuve pas le raisonnement de la victime et énonce dans son attendu « que la victime de faits prévus à l'article 706-3 du Code de procédure pénale ne peut obtenir réparation que des dommages résultant des atteintes à sa personne, d'autre part, qu'il résulte de la combinaison des articles 10 du Code de procédure pénale et 695, alinéa 4, du Code de procédure civile que la rémunération de l'expert désigné par la juridiction répressive statuant sur intérêts civils, qui est comprise dans les dépens de l'instance pénale, ne constitue pas une dépense exposée par la victime du fait de son dommage corporel ».
La Haute juridiction interprète donc strictement les textes et estime que ces dépenses ne sont pas directement en lien avec le dommage corporel et ne peuvent donc pas, à ce titre, être prises en charge par le FGTI. La victime obtiendra donc l'indemnisation de son préjudice sur la base des conclusions des experts, y compris l'expertise d'assurance, experts qu'il lui appartiendra de rémunérer. Notons que si l'auteur de l'infraction avait été connu ou solvable ces frais auraient pu lui être réclamés.